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Transformer l’école Pour la rendre égalitaire. Relevons le défi !

publié le 30 septembre 2016

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Depuis la rentrée, une même petite musique résonne dans de nombreux media : l’Education Nationale a tout faux, et ce sur tous les plans ! La conclusion naturelle de cette offensive médiatique serait-elle la réduction du budget de l’Education Nationale ? Serait-elle d’en finir avec le service public afin d’ouvrir la voie à la privatisation ?
Le système éducatif actuel doit effectivement être transformé en profondeur. Il accentue les inégalités sociales et les transforme en inégalités scolaires, il n’offre pas toujours de bonnes conditions d’accueil à tous les élèves, il n’offre pas de bonnes conditions de travail à ses personnels, ni ne reconnait leur engagement professionnel à sa juste valeur. Cela dit, on est loin du paysage que voudraient dessiner certains.
A l’inverse du discours décliniste qui nous est servi, nous croyons dans les forces de l’enseignement public, mais ces forces doivent se déployer au sein d’un système éducatif transformé, à qui l’Etat donne les moyens de donner corps à l’ambition de faire réussir tous les élèves.

Pour une politique d’éducation prioritaire ambitieuse

Depuis deux jours, on nous répète que la politique d’éducation prioritaire serait bonne à jeter. Se fondant sur une interprétation du rapport du CNESCO, les reportages s’enchainent. La tonalité de certains d’entre eux nous laisse croire que la solution serait tout simplement de mettre fin à toute forme de discrimination positive pour les élèves qui en ont le plus besoin.
Des problèmes en éducation prioritaire, il y en a ; mais ne pas distinguer les différentes orientations de cette politique menée depuis 30 ans et ignorer le travail mené au sein de nombreuses écoles est absurde, voire mal intentionné. Les détracteurs de l’Ecole devraient lire les études très intéressantes de Jean-Yves Rochex sur cette problématique. Ce dernier analyse fort justement les oscillations entre les politiques de type compensatoire et de type transformatrice. Selon ce chercheur, les objectifs de démocratisation du système scolaire n’apparaissent plus dans les politiques menées, le débat a été confisqué au profit d’une multiplication voire d’un empilement des dispositifs.
Par ailleurs, si on étudie vraiment le rapport du CNESCO, les auteurs pointent les difficultés recensées sur le terrain et notamment le manque d’accompagnement pédagogique en terme de formation et de moyens. C’est bien cela dont il doit être question : comment transformer nos pratiques au sein de nos classes ? Dans quelles conditions est-ce vraiment possible en terme d’effectifs, de dispositifs (décharge de service, « Plus de maitres que de classe », scolarisation des élèves de moins de trois ans) ? Avec quel accompagnement de l’Institution ?

Des enseignant-es investi-es au service des élèves

Cette controverse intervient après de multiples reportages autour du livre d’une ancienne jeune collègue d’école maternelle. Même s’il y aurait de quoi débattre, il ne s’agit pas ici d’entrer dans la controverse pédagogique soulevée par la thèse qui y est développée, mais de rétablir la réalité des faits face à l’interprétation et aux conclusions qu’en ont tirées hâtivement certains media. La toile de fond de ces reportages décrivait bien souvent une réalité qui n’est pas celle de l’école aujourd’hui : les méthodes pédagogiques s’y seraient arrêtées aux années 60, on demanderait ainsi à tous les élèves de France de la maternelle au CM2 de rester passifs face à un enseignant-e délivrant des savoirs de manière frontale. C’est évidemment lourdement méconnaitre ou sciemment travestir la réalité de l’enseignement aujourd’hui.

Qui sont vraiment les fossoyeurs de l’école de la République ?

Enfin, de manière concomitante, sortent un livre et des articles de presse sur « les assassins de l’école » appelés aussi les « Fossoyeurs de la République ». Selon certains éditorialistes, ces destructeurs de l’école française seraient aussi bien des chercheurs que de hauts-fonctionnaires. Il ne s’agit pas ici de défendre tel ou tel car nous ne partageons pas forcément la doctrine de l’ensemble des personnes en cause. Cependant, derrière cette propagande mensongère, c’est bien le camp réactionnaire qui est à la manœuvre. Ces auteurs en profitent pour distiller encore et encore leurs recettes sentant bon la naphtaline, recettes qui ont par ailleurs échoué par le passé et participé à l’élaboration de ce système inégalitaire. A l’inverse des auteurs de ces articles qui déforment de manière éhonté le travail de Roland Goigoux par exemple, nous le remercions de mener des recherches avec des enseignant-es dans le but de faire avancer la réflexion, outillant ainsi les collègues dans l’apprentissage de la lecture. Il en va de même de Viviane Bouysse sur les apprentissages à l’école maternelle.

Débattons ensemble des questions éducatives !

Il est réjouissant et salvateur que notre pays se passionne pour les questions éducatives. L’école doit être transformée pour construire une société plus juste et plus solidaire ! Aux côtés de nos collègues, nous sommes déterminé-es à y arriver et nous pouvons réussir car tous les élèves sont capables de réussir.
Pour ce faire, il nous faut partir d’un constat objectif, réfléchi et partagé sans nier les problèmes majeurs de notre système. Nous devons nous appuyer sur le travail réel effectué au quotidien dans les écoles pour transformer les choses. En maternelle comme en éducation prioritaire, tout n’est pas rose évidemment, mais contrairement à ce que laissent penser certain-es en ce moment, au quotidien, les enseignant-es s’engagent, innovent, essaient de changer concrètement les choses dans le but de faire réussir leurs élèves. Ils le font en début de carrière, en milieu de carrière et même au bout de 30 ans de métier ! Ce n’est pas chose aisée car les moyens manquent et parfois, la hiérarchie et le système dans son ensemble les empêchent de faire correctement leur travail. Ce travail est empêché par le manque de moyens ou encore par les mauvaises réformes imposées contre l’avis majoritaire, comme cela a été le cas avec les rythmes scolaires.

La transformation de l’école, ça ne se décrète pas, ça se construit !

Cette transformation de l’école que nous appelons de nos vœux ne se décrète pas. Elle doit être accompagnée et encouragée par des moyens, du temps et de la confiance aux personnels qui tentent de la mettre en œuvre au quotidien. Notre société ne fonctionne plus comme il y a un siècle : les savoirs se sont énormément développés et complexifiés ; notre métier doit évoluer. Cela ne peut dépendre d’initiatives individuelles, c’est à l’Etat d’organiser cette évolution et d’y mettre les moyens. L’Education Nationale doit enfin diffuser au sein de notre profession les recherches universitaires qui foisonnent en didactique, psychologie ou sociologie... Ces travaux doivent servir de base à une « dispute professionnelle » entre les enseignant-es et pour cela, le temps et l’accompagnement nécessaires doivent être donnés aux collègues.
Des premières tentatives sont esquissées avec les décharges de service octroyées aux enseignant-es en REP + ou avec la création de postes de maitres surnuméraires, mais le déploiement de ces dispositifs ne concerne qu’une très faible minorité d’école et n’est pas toujours accompagné de manière pédagogique. Il faut aller bien plus loin. L’organisation « un maitre, une classe » doit être revue pour laisser place à la mise en œuvre d’une revendication historique de notre syndicat : « plus de maîtres que de classe » dans l’ensemble des écoles, ce qui permettrait de changer vraiment les pratiques pédagogiques, donnerait du temps aux enseignant-es pour travailler en équipe et se former tout en baissant notre temps de travail. Ce projet est complètement différent du maitre surnuméraire proposé par le Ministère.
Enfin, évidemment, la réalisation d’une école émancipatrice ne peut se faire sans transformation de notre société. L’école, seule, ne peut pas tout.

Nos collègues vivent douloureusement l’inefficacité de notre système scolaire face à la reproduction des inégalités sociales. Le SNUipp-FSU porte haut et fort ses revendications aux côtés des personnels. Nous sommes déterminés à ce qu’elles deviennent réalité ! Il est grand temps que le Ministère dépasse les beaux discours et changent vraiment le cours des choses !


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