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publié le 14 mai 2025

Près d’un an après l’annonce de l’abandon de la réforme du recrutement et de la formation initiale des enseignant-es et CPE, dans des conditions inacceptables, le ministère de l’Éducation nationale a relancé le chantier en validant seul une nouvelle architecture de formation avec notamment le concours à Bac+3. Le placement du concours sous condition de licence suivi de deux années de formation rémunérée reconnues par un Master correspond aux revendications portées par la FSU-SNUipp depuis plusieurs années. La FSU-SNUipp Paris acte donc cette avancée contenue dans la nouvelle formation mais pointe les dangers des contenus de formation prévus dans la réforme. La FSU-SNUipp continue donc à demander un moratoire pour une véritable concertation.
Le Ministère a publié un décret modifiant en profondeur toute l’architecture de la formation initiale à commencer par la place du concours qui aura désormais lieu en 3ème année de licence au lieu de la 2ème année de Master. Une licence spécifique “professorat des écoles” (LPPE) est aussi créée. Les étudiant-es issu-es de cette licence seront dispensé-es des épreuves d’admissibilité. Pour la FSU-SNUipp c’est une atteinte à l’équité entre candidat-es voire un coin enfoncé dans le principe même du recrutement par concours !
Les deux années de formation, allant de l’obtention du concours à la titularisation, seront rémunérées : 1 400€ nets la première année en tant qu’élève fonctionnaire puis 1 800€ net la seconde année en tant que fonctionnaire stagiaire. Cette dernière étant effectuée à 50% en responsabilité de classe. Les deux années de master seront toutes les deux prises en compte dans le calcul de la retraite. En contrepartie de cette rémunération, les nouveaux et nouvelles enseignant-es devront rester 4 ans dans la Fonction publique. Les différentes voies d’accès au concours sont maintenues, la durée de formation pouvant être réduite de moitié et commencer directement en deuxième année de master selon la formation dont seront issu-es les lauréat-es.
La nouvelle formation sera désormais autant entre les mains du ministère de l’Éducation Nationale que de celui de l’Enseignement supérieur : une co-tutelle qui renforce le poids du MEN dans les différents parcours. Enfin, le mémoire de master est remplacé par un rapport de stage.
Cette réforme, présentée l’an passé, avait soulevé nombre de questionnements qui n’étaient pas résolus quand elle fut suspendue. Pourtant, au moment de remettre l’ouvrage sur le métier, le Ministère fait le choix de passer en force : il a publié le décret de cette réforme le 17 avril dernier… avant même que l’ensemble des groupes de travail (GT) ne se soient réunis avec les organisations syndicales ! De même, l’arrêté sur l’organisation du concours est paru sans aucune concertation et sans qu’aucun contenu (sujets types) pour le 1er degré ne soit présenté aux organisations syndicales représentatives.
Quant aux décrets statutaires encadrant les métiers de l’enseignement, ils n’ont pas non plus fait l’objet de discussions préalables. Lors du comité social d’administration ministériel (CSA-M) du 27 juin 2024 des modifications d’ampleur ont été apportées le jour même du vote, interdisant toute analyse et débat sérieux et provoquant le départ de la quasi unanimité des organisations syndicales.
Enfin, le calendrier de mise en place de la réforme est intenable : à seulement cinq mois de la rentrée 2025, ni les Universités, ni les formateurs et formatrices, ni les étudiant-es ne savent à quoi s’attendre !
Le recrutement à Bac+3 et la formation rémunérée durant 2 ans avec la reconnaissance Bac+5 peuvent répondre en partie à la crise d’attractivité du métier d’enseignant. Si la FSU-SNUipp se félicite d’être entendue sur cette revendication qu’elle porte depuis longtemps, cela ne saurait suffire. En effet, sans réelle augmentation des salaires, sans amélioration des conditions de travail, il n’y a aucun miracle à attendre !
La tutelle du Ministère sur l’ensemble des parcours de formation montre une volonté de contrôle de l’institution qui ne peut être perçue que comme une volonté d’imposer, le plus tôt possible, les “bonnes pratiques” : une volonté de contrôle en somme. Ce n’est pas acceptable.
Devant tant d’incertitudes et de méthodes contestables, cette réforme doit être suspendue et les discussions doivent reprendre : la FSU réclame un moratoire immédiat. Pour elle, il est urgent de repenser la formation et le recrutement des enseignant-es dans une logique qualitative permettant le développement d’un service public d’éducation réellement émancipateur pour les élèves et respectueux des personnels.
Alors que la session 2026 approche à grands pas, la balle est désormais dans le camp du ministère, qui devra choisir entre un passage en force ou une véritable réouverture des discussions.